Juin 10
13
Les dégâts d'Obama: 1/ la belle parole
Nous entamons aujourd'hui, avec l'inconstance qui caractérise ce blog, une série sur les perspectives à prévoir de l'erratique politique internationale Nord-Américaine.
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Lors de ses débuts le Président Obama, encore pénétré de l'énergie d'une campagne faite de discours particulièrement brillants et porteurs d'espoir continua de reposer sur la magie du verbe et promit, pas seulement à l'Amérique mais aussi au monde, une recherche de solutions basée sur une approche différente, dénuée du manichéisme de Bush, et plus orientée vers l'échange que vers la contrainte, la promesse plutôt que la menace.
Bonnes intentions, avenirs radieux, chaînes brisées, transparence intégrale, rasage gratis, amour sur Terre étaient au programme.
S'y ajoutait de manière spectaculaire-car ce 44ème Président des USA est jeune, pourvu d'un passé original et doté d'une expérience personnelle du monde rare chez ses pairs comme chez ses prédécesseurs- une main tendue vers ceux qui avaient pris l'habitude de recevoir chaque matin des seaux d'opprobre de la part du 43ème, G.W.Bush.
L'Iran , et même la Corée du Nord , eut droit à cette main tendue devant les micros.
Téhéran est un des exemples les plus frappants de ce qui est peut-être un des trois plus gros défauts du jeune président: un mauvais sens du timing (illustré tout récemment par sa décision de ré-autoriser les forages pétroliers en eaux profondes, trois jours avant la catastrophe de Deepwater et BP).
Après son fameux discours de la main tendue, Obama ne fit rien devant la réaction méfiante de Téhéran pour faire baisser la tension dans le Golfe Persique: accumulation de navires de guerre, vente de missiles plus sophistiqués à Israël et aux royaumes pétroliers au moment où Tel-Aviv parlait quasi-ouvertement de "prévention" (attaque massive contre les installations nucléaires iraniennes), aide aux Kurdes.
Lors des manifestations populaires consécutives aux fraudes électorales, Obama ne témoigna d'aucune solidarité, d'aucun soutien. On pouvait comprendre au début le souhait de ne pas paraître endosser Moussavi, mais les tueries de jeunes et les persécutions appelaient une réaction, ne serait-ce qu'en tentant d'assurer la protection des opposants.
Par la suite, la litanie inefficace des menaces de sanctions qui ne nuisent qu'à la population et ne font qu'isoler un pays profondément désireux de retrouver sa place dans le monde persuade les dirigeants de la République Islamique que rien n'est changé, et les renforce dans leur attitude de rigidité.
Tel qu'il a placé l'Amérique, Obama dont la parole ne vaut plus grand'chose en Iran n'a désormais devant lui qu'un choix peu original:
- laisser pourrir,
- continuer d'infiltrer le pays,
- laisser les Israeliens attaquer (et l'on se demande même s'il aura autant que Bush le pouvoir et le courage de contrôler le niveau d'agression),
- intervenir militairement.
Bref, comme Bush.
Le premier coup de fil d'Obama fut adressé à Mahmoud Abbas
Tout un chacun y vit un signal que le sort des Palestiniens allait enfin être pris en compte, une politique plus équilibrée allait voir le jour.
Pourtant la légitimité de Mahmoud Abbas était déjà une vaste tromperie, non seulement parce que son terme présidentiel était échu, mais parce qu'il ne contrôlait pas Gaza dont on se souviendra qu'il est régi par le Hamas (comme devrait d'ailleurs l'être la Cisjordanie) à la suite d'élections reconnues comme tout-à-fait régulières. Si donc Obama persistait dans l'erreur de la politique imposée par Bush et Sharon consistant à ne pas discuter avec ses adversaires, comment croire qu'un basculement pourrait opérer?
Grâce aux petites navettes d'un Mr. Mitchell qui se fit insulter par les dirigeants de Tel-Aviv dès son premier voyage en Israël ?
Le discours du Caire.
Ça oui, on allait voir une Amérique digne des espoirs portés envers un jeune président Noir, juriste, cultivé conscient que rien ne pourrait être réglé dans les conflits tant que la paix ne surviendrait pas au Moyen-Orient, et qui se déplaçait même jusqu'en Egypte pour parler au peuple.
Et non, affirma t'il aux micros égyptiens, il ne saurait y avoir de paix sans justice, de justice sans démocratie, de démocratie sans rejet de toute dictature, de toute illégalité, que ce soient les implantations israéliennes ou le fonctionnement de passation du pouvoir chez les alliés Arabes.
Pourtant, aucun effort ne fut entrepris pour parler aux opposants arabes, que ce soit en Egypte, en Jordanie, au Koweit, en Arabie Saoudite , etc.
Même politique aveugle en Somalie , mêmes entreprises de subornement au Maghreb. Comment s'étonner que toute une frange cultivée, moderne, impliquée du monde Arabe ait fait-si l'on ose dire- une croix sur le président des USA ?
L'Amérique et la Russie allaient vivre, sinon une histoire d'amour,
Du moins quelque chose qui y ressemblerait, grâce notamment au jeune âge des deux présidents et à leur commune volonté de rapprochement et d'apaisement des tensions.
Las, le manque de contrôle de Bidden sur le président de Géorgie Saakashvili, qui attaqua l'Ossétie et l'Abkhazie juste après une visite du vice-président US, le peu de soutien de Washington et l'absence de gesticulation pendant la courte guerre Russo-Géorgienne convainquirent un grand nombre de chefs d'Etat de la mollesse ou de l'immaturité de l'hôte de la Maison-Blanche, obligé de reposer sur Sarkozy pour éteindre le feu.
Les experts militaires savent maintenant ce que comprirent certains à l'époque: si la guerre avait duré 60 heures de plus, la Russie , dont l'Armée était à bout aurait été obligée de jouer la trêve.
Obama et son équipe ont démontré à cette occasion leur incapacité à lire correctement les rapports de forces, et beaucoup d'évènements, de manoeuvres ou de crises vont directement découler de cette mauvaise gestion, que ce soit entre Israël et la bande de Gaza, l'Iran , la Somalie , Cuba, les provocations Nord-Coréennes ou l'encerclement de Taiwan par la marine de guerre chinoise et ses incursions en Mer du Japon .
Cela ira même jusqu'à une modification subtile, discrète, mais profonde des choix de l'Allemagne .
Désormais, il semble qu'à défaut d'une action spectaculaire, Barak Obama n'a plus guère de chances de faire peser sur le monde de façon plus efficace que ne le faisait Georges W.Bush en fin de règne.
Nous verrons dans un deuxième article comment cette perte d'influence s'exerce dans la guerre en Afghanistan , et avec quelles conséquences dommageables pour les rapports des USA avec leurs alliés.
Mais aussi que la porte est dorénavant ouverte pour une crise majeure, illustrée actuellement par la mauvaise gestion de l'affrontement russo-américain sur le Kirghistan, affrontement qui risque de s'étendre au voisinage et de faire rentrer dans la partie des joueurs indésirables.
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